PARCC West Africa

Lignes directrices pour les gestionnaires des AP face au changement climatique

Résultats clés : Dans le cadre du changement climatique, les gestionnaires des AP devront de plus en plus gérer les changements, au lieu de s'attacher à maintenir les systèmes existants. Les éléments clés de la planification de la gestion consistent à (i) réviser les buts et objectifs existants du point de vue du changement climatique afin d'adopter des objectifs tournés vers l'avenir; (ii) évaluer la vulnérabilité au changement climatique et utiliser ces informations pour des actions pour l'adaptation ; et (iii) renforcer les capacités pour l'adaptation et assurer le suivi de l'efficacité des actions.

Des lignes directrices pratiques ont été élaborées en vue de présenter les bonnes pratiques et approches pour planifier et gérer les aires protégées dans le cadre du changement climatique, en se focalisant sur l'Afrique de l'Ouest. Elles visent essentiellement les gestionnaires et les planificateurs des AP, mais peuvent également être utiles à d'autres parties prenantes impliquées dans la gestion des aires protégées. Ce rapport découle de l'adaptation d'éléments clés de la Série de lignes directrices de la CMAP de l'UICN relatives aux meilleures pratiques pour les aires protégées : « Responding to Climate Change, Guidance for protected area managers and planners » (Gross et al., à paraître), que nous avons complétées avec des exemples et considérations spécifiques à la région d'Afrique de l'Ouest, en nous appuyant sur les résultats du projet PARCC.

PLANIFIER POUR LE CHANGEMENT

Dans le cadre du changement climatique, les gestionnaires des aires protégées seront de plus en plus mis au défi de gérer les changements, au lieu de s'attacher à conserver les systèmes existants. Un aspect clé de l'adaptation au climat pour la gestion des AP consistera à réviser les buts et objectifs existants du point de vue du changement climatique afin d'adopter des objectifs tournés vers l'avenir et informés par les considérations climatiques. Dans ce cadre, il s'agit de prendre en compte le paysage physique et institutionnel plus général, d'élargir l'aspect temporel de la planification, de mettre en évidence les processus écologiques et liés à l'évolution des espèces, et de faire face aux incertitudes. Les stratégies en matière d'adaptation devront prendre en compte les menaces et besoins spécifiques des aires protégées, et être capables de répondre aux impacts climatiques les plus significatifs. Toutefois, certaines contraintes, telles que des demandes concurrentes ou des ressources restreintes, peuvent empêcher le développement et la mise en oeuvre de plans individuels. L'intégration de considérations climatiques et de l'adaptation au climat au sein de processus existants peut permettre de surmonter ces difficultés et d'associer des besoins d'adaptation à plus long terme à des défis à court terme pour la conservation.

ÉVALUER LA VULNÉRABILITÉ AU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Les évaluations de la vulnérabilité au climat fournissent les informations nécessaires pour aider à identifier les options en termes d'adaptation., notamment des listes d'objectifs importants en matière de conservation, des projections de variables climatiques clés, et concernant les conséquences écologiques probables de conditions climatiques changeantes. Il existe un certain nombre d'approches pour évaluer la vulnérabilité des espèces, des habitats, des écosystèmes, des biomes et des communautés humaines. Les décisions clés à prendre comprennent la sélection de la zone, de la période, ainsi que du nombre et des types spécifiques d'objectifs de conservation à évaluer. Diverses projections climatiques peuvent être utilisées, qui diffèrent en termes d'échelle géographique, de variables climatiques, de résolution temporelle et de méthodologie. Les résultats des évaluations de la vulnérabilité peuvent permettre de déterminer les priorités en identifiant les vulnérabilités qui constituent un lien crucial entre les objectifs de conservation et les actions pour l'adaptation. Les critères utilisés pour identifier ces vulnérabilités varient en fonction des objectifs d'une aire protégée ou d'un processus de planification et peuvent inclure : l'importance écologique, les implications pour d'autres valeurs sociétales pertinentes, l'ampleur, la probabilité, la réversibilité ou le timing des impacts, ainsi que le potentiel d'une adaptation réussie. Dans ce contexte, les résultats du projet PARCC sont particulièrement utiles, notamment ceux découlant des modèles de distribution des espèces qui ont permis de définir la distribution attendue des espèces dans le cadre de scénarios futur du changement climatique, et des évaluations de la vulnérabilité basées sur les traits biologiques qui ont identifié les espèces vulnérables au changement climatique.

STRATÉGIES DE GESTION

L'identification et la sélection d'options en matière d'adaptation peuvent être réalisées par le biais d'un éventail de techniques, notamment des ateliers de réflexion et la planification de scénarios. Cela implique généralement de rassembler des experts de différents domaines, les gestionnaires des parcs et les décideurs, les citoyens et d'autres personnes détentrices de connaissances au niveau local. Les « actions sans regrets » sont des actions que les gestionnaires d'AP peuvent entreprendre pour se préparer au changement climatique, quelles que soient les stratégies choisies et quelle que soit l'ampleur du changement climatique à laquelle sera confrontée l'AP. Elles comprennent les actions suivantes : garantir que des capacités de gestion sont en place pour une gestion efficace dans le cadre du changement climatique ; s'assurer qu'il existe un appui institutionnel pour la gestion adaptative ; améliorer les connaissances et les informations concernant les impacts et les réponses à un climat changeant ; favoriser la prise de conscience et motiver les actions réalisées par d'autres personnes par le biais d'une communication améliorée ; et impliquer les participants et les partenaires dans des solutions communes.

Les meilleures pratiques pour l'adaptation au niveau des systèmes d'AP comprennent l'agrandissement du réseau d'AP de manière à ce que l'adaptation des espèces et des écosystèmes au changement climatique soit améliorée ; la planification d'un mélange de différentes tailles d'AP dans le système, mais en établissant une priorité pour les unités représentatives de très grande taille ; la planification d'AP présentant une grande diversité en termes de géographie physique ; la garantie que le cadre juridique et réglementaire permet aux gestionnaires des parcs la flexibilité d'une adaptation au changement climatique ; la garantie de la perméabilité des paysages terrestres et marins en conservant et/ou en améliorant les liens, les couloirs et la connectivité, ainsi que l'établissement de priorités pour la protection des systèmes intacts de grande taille ; l'intégration des AP dans les paysages environnants en vue de développer une planification et des considérations communes concernant entre autres la connectivité et la faune transfrontalière, ainsi que la révision régulière des frontières des AP afin de vérifier si des ajustements sont nécessaires. Les résultats de l'évaluation de la connectivité du réseau régional d'AP dans le cadre du projet PARCC seront également particulièrement utiles dans la sélection d'AP et/ou de liens manquants entre les AP les plus importantes à maintenir, ou à renforcer, en vue d'améliorer la connectivité des AP. En outre, le développement du système de planification systématique de la conservation pour l'Afrique de l'Ouest et l'identification de zones prioritaires pour la conservation pourront déterminer la conception de nouvelles AP dans la région, tout en tenant compte des impacts du changement climatique sur la distribution des espèces.

Enfin, les stratégies à envisager au niveau des aires protégées comprennent (i) une gestion relative aux conditions existantes en améliorant l'intégrité écologique et la résilience là où le renouvellement anticipé des espèces est très faible, et où ne se trouve pratiquement aucune espèce considérée comme vulnérable au changement climatique ; (ii) une gestion active en vue de maintenir des valeurs écologiques spécifiques là où un certain degré de renouvellement est anticipé mais n'est pas très important, et où seulement quelques espèces vulnérables au changement climatique ont été identifiées ; (iii) une gestion relative aux modifications importantes des conditions écologiques antérieures là où un renouvellement important existe, et où une perturbation par le changement climatique est attendue pour un nombre important d'espèces ; et (iv) l'orientation vers de nouveaux objectifs écologiques et vers la gestion d'un nouveau type d'écosystème là où un renouvellement très important des espèces existe, et où un très grand nombre d'espèces sont considérées comme vulnérables au changement climatique. Les données relatives au renouvellement attendu des espèces dans les AP ont été compilées dans le cadre du projet PARCC, ainsi que la liste des espèces considérées comme vulnérables au changement climatique, et serviront ainsi à l'identification de la meilleure stratégie de gestion. Un autre élément clé pour la planification de la gestion dans le cadre du changement climatique consiste à renforcer les capacités pour l'adaptation au changement climatique. Le projet PARCC a également contribué au renforcement des capacités à de multiples niveaux institutionnels par le biais de plusieurs ateliers nationaux et régionaux de formation sur les thèmes des aires protégées et du changement climatique.

SUIVI ET ÉVALUATION

Le suivi et l'évaluation (S&E) constituent la base pour identifier les processus d'adaptation et les activités de gestion ayant été menés à bien, et donc une gestion adaptative. Un programme de suivi et d'évaluation bien conçu montre comment les actions de gestion considèrent la vulnérabilité au changement climatique, et permet de mesurer comment ces actions contribuent à l'adaptation. Les bonnes pratiques comprennent l'utilisation de principes établis et l'appui à la gestion adaptative, l'identification de la manière dont le S&E contribue à l'adaptation, l'anticipation et le développement d'actions de suivi du changement, et l'intégration d'indicateurs spécifiques à l'adaptation dans les pratiques de suivi existantes. L'utilisation de l'outil révisé de suivi de l'efficacité de la gestion (METT), développé dans le cadre du projet PARCC, peut aider à effectuer le suivi de l'efficacité avec laquelle les aspects liés au changement climatique sont intégrés dans la conception et la gestion des AP.

Misrachi M., et Belle E. 2016. Lignes directrices pour les gestionnaires des aires protégées face ay changement climatique en Afrique de l'Ouest. UNEP-WCMC technical report.