PARCC West Africa

Vulnérabilité des espèces en fonction de leurs traits biologiques

Résultats clés : Un certain nombre d'espèces d'Afrique de l'Ouest (notamment des amphibiens, des oiseaux, des poissons d'eau douce, des mammifères et des reptiles) ont été identifiées comme étant vulnérables au changement climatique, en se basant sur leurs traits biologiques et écologiques spécifiques. Parmi ces espèces, celles qui ont été évaluées comme étant menacées au niveau mondial doivent être considérées comme prioritaires pour la conservation.

Le Programme mondial sur les espèces de l'UICN a appliqué une méthodologie différente, appelée Evaluation de la vulnérabilité basée sur les traits (TVA), qui a permis d'évaluer la vulnérabilité des espèces au changement climatique en se basant sur leurs traits biologiques spécifiques, sans prendre en compte les aspects géographiques de la distribution des espèces.

Par le biais de deux ateliers d'experts, tenus à Lomé au Togo, impliquant la participation d'experts nationaux et internationaux, ainsi que de consultations à distance, et en utilisant les données provenant de projets antérieurs, les données relatives aux traits biologiques et écologiques des espèces ont été compilées pour 183 amphibiens, 1,172 oiseaux, 517 poissons d'eau douce, 405 mammifères et 307 reptiles. Leur «sensibilité » et leur «capacité d'adaptation » au changement climatique ont ensuite été déduites à partir de ces données.

Les polygones de distribution des espèces, compilés dans le cadre du processus d'évaluation des espèces pour la Liste rouge de l'UICN, ont été superposé aux projections climatiques futures fournies par le bureau météorologique du Centre Hadley du Royaume-Uni en vue de déterminer les changements en termes de moyennes et de variabilité des températures et des précipitations auxquelles chaque espèce pourrait être exposée. Les espèces considérées comme étant à la fois sensibles et présentant une faible capacité d'adaptation au changement climatique, et étant parmi les plus fortement exposées aux changements climatiques, sont qualifiées de «vulnérables au changement climatique ».

Le nombre d'espèces répondant à chaque composante de notre cadre d'évaluation a été calculé, pour tous les traits biologiques utilisés et pour chaque « dimension » du cadre (sensibilité, faible capacité d'adaptation et exposition), ainsi que le nombre total d'espèces considérées comme étant vulnérables au changement climatique. À partir de ces résultats, des cartes ont été créées qui mettent en évidence les grandes régions géographiques contenant un nombre et/ou un taux élevé(s) d'espèces vulnérables au changement climatique pour un taxon spécifique. Ces informations peuvent aider les personnes impliquées dans la conservation à identifier les mécanismes les plus répandus par lesquels le changement climatique pourrait avoir un impact sur chaque groupe taxonomique de la région, et peuvent contribuer au développement d'actions appropriées en matière d'adaptation pour les espèces ou groupes d'espèces.

Une vulnerabilite plus importante au changement climatique se manifeste la ou les especes sont confrontees a une plus forte Exposition au changement climatique, et possedent egalement des traits biologiques qui leur conferent a la fois une Sensibilite et une Faible capacite d'adaptation a de tels changements.

Amphibiens

Globalement, un total de 12 (7 %), 18 (10 %) et 46 (25 %) espèces d'amphibiens sont considérées comme vulnérables au changement climatique, respectivement, d'ici aux périodes de 2010-2039, 2040-2069 et 2070-2099, en se basant sur les projections climatiques régionales et sur une hypothèse optimiste pour les valeurs correspondant aux données manquantes. En termes de proportions, nos évaluations suggèrent que, d'ici à la période de 2040-2069, les impacts les plus importants se produiront dans les régions arides et semiarides plus au nord. D'ici à 2070-2099, des pourcentages plus importants d'espèces vulnérables peuvent être observés dans les zones généralement humides plus au sud. Parmi les espèces identifiées comme vulnérables au changement climatique d'ici à 2040-2069, une seule espèce, Amietophrynus perreti, est considérée comme menacée au niveau mondial.

Distribution des especes vulnerables au changement climatique d'ici a la periode de 2040-2069. Nombre total d'especes par cellule de quadrillage evaluees comme etant vulnerables au changement climatique (a gauche) et pourcentage d'especes dans chaque cellule de quadrillage evaluees comme etant vulnerables au changement climatique (a droite).

Oiseaux

Globalement, un total de 17 (1,5 %), 247 (21 %) et 309 (26 %) espèces d'oiseaux sont considérées comme vulnérables au changement climatique, d'ici aux périodes de 2010-2039, 2040-2069 et 2070-2099, respectivement, en se basant sur les projections climatiques régionales et sur une hypothèse optimiste pour les valeurs correspondant aux données manquantes. En termes de proportions, nos évaluations suggèrent que d'ici à 2040-2069 les impacts les plus importants se produiront dans la zone méridionale humide, ainsi que dans la zone aride du nord (de la Mauritanie à l'ouest, au Tchad à l'est), où jusqu'à 31 % des espèces présentes ont été répertoriées comme étant vulnérables au changement climatique. Parmi les espèces identifiées comme vulnérables au changement climatique d'ici à 2040-2069, 13 espèces sont menacées au niveau mondial.

Poissons d'eau douce

Globalement, un total de 99 (19 %), 202 (39 %) et 311 (60 %) espèces de poissons d'eau douce sont considérées comme vulnérables au changement climatique d'ici aux périodes de 2010-2039, 2040-2069 et 2070-2099, respectivement, en se basant sur les projections climatiques régionales et sur une hypothèse optimiste pour les valeurs correspondant aux données manquantes. En termes de proportions, nos évaluations suggèrent que, d'ici à 2040-2069, les impacts les plus importants se produiront dans les régions désertiques du nord du Niger et du Tchad, où toutes les espèces de poissons d'eau douce ont été répertoriées comme étant vulnérables au changement climatique. D'ici à 2070-2099, les zones de l'est de la Mauritanie et de l'est du Mali ressortent également comme comportant plus de 80 % d'especes piscicoles d'eau douce vulnérables. Parmi les espèces identifiées comme vulnérables au changement climatique d'ici à 2040-2069, 62 espèces sont menacées au niveau mondial.

Mammifères

Globalement, un total de 22 (5 %), 63 (16 %) et 115 (28 %) espèces de mammifères sont considérées comme vulnérables au changement climatique d'ici aux périodes de 2010-2039, 2040-2069 et 2070-2099, respectivement, en se basant sur les projections climatiques régionales et sur une hypothèse optimiste pour les valeurs correspondant aux données manquantes. En termes de proportions, nos évaluations suggèrent que, d'ici à 2040-2069, les impacts les plus importants se produiront dans les régions désertiques du nord de la Mauritanie, du Mali, du Niger et du Tchad, où jusqu'à 54 % des espèces sont répertoriées comme étant vulnérables au changement climatique. Parmi les 63 espèces identifiées comme vulnérables au changement climatique d'ici à 2040-2069, huit espèces sont menacées au niveau mondial.

Reptiles

Globalement, un total de 22 (7 %), 66 (21 %) et 104 (34 %) espèces de reptiles sont considérées comme vulnérables au changement climatique d'ici aux périodes de 2010-2039, 2040-2069 et 2070-2099, respectivement, en se basant sur les projections climatiques régionales et sur une hypothèse optimiste pour les valeurs correspondant aux données manquantes. En termes de proportions, nos évaluations suggèrent que, d'ici à 2040-2069, les impacts les plus importants se produiront dans les régions désertiques et du Sahel de la Mauritanie, du Mali, du Niger et du Tchad, où plus de 40 % des espèces sont répertoriées comme étant vulnérables au changement climatique. Parmi les 66 espèces identifiées comme vulnérables au changement climatique d'ici à 2040-2069, et selon un scénario optimiste concernant les éléments inconnus des données, trois espèces sont menacées au niveau mondial (bien que 41 espèces n'aient pas été évaluées pour la Liste rouge de l'UICN).

Les cartes présentant les zones géographiques contenant un grand nombre et/ou une proportion élevée d'espèces vulnérables au changement climatique pour un taxon spécifique peuvent être utilisées pour déterminer où des mesures de conservation en vue de réduire les impacts du changement climatique pourraient être nécessaires de manière plus urgente, ainsi que là où de telles mesures pourraient être les plus efficaces, en termes de réduction des impacts pour le plus grand nombre et/ou la proportion la plus élevée d'espèces.

Pour chaque groupe taxonomique, cette étude a également présenté les risques d'extinction, selon la Liste rouge des espèces menacées de l'UICN, notamment des cartes qui montrent les densités en espèces menacées dans l'ensemble de la région. Les espèces qui sont à la fois menacées au niveau mondial et vulnérables au changement climatique devraient être considérées comme étant hautement prioritaires pour les actions de conservation. De la même manière, les espèces qui sont soit menacées soit vulnérables au changement climatique devraient également bénéficier d'une attention particulière, bien que les détails de ces actions varient en fonction des résultats des évaluations. Les espèces qui sont considérées dans la catégorie Données insuffisantes sur la Liste rouge et/ou qui n'ont pas pu être évaluées en termes de leur vulnérabilité au changement climatique en raison du manque d'informations devraient être prioritaires pour la recherche, afin de déterminer les niveaux de risques auxquels elles pourraient être exposées.

Enfin, des exemples généraux des différentes manières d'utiliser les évaluations de la vulnérabilité en vue de développer des stratégies de conservation sont présentés. Il est souhaitable que les professionnels considèrent ces résultats espèce par espèce, et les utilisent pour modifier les approches existantes relatives à la conservation, ou pour en développer de nouvelles qui considèrent clairement les impacts du changement climatique sur les espèces.

Carr, J.A., Hughes, A.F. et Foden, W.B. (2014). Evaluation de la vulnérabilité des espèces ouest-africaines au changement climatique. UNEP-WCMC technical report.

Annexe: Données complémentaires sur les espèces